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4.INTERACTION

 

 

4.0. introduction
Une des spécificités de l'oeuvre interactive est de faire appel à la perception, en proposant des moments inédits, en relation à des évènements humains ou environnementaux. Elle ravive la figure traditionnelle du couple artistes / ingénieurs, et brouillent les frontières entre les disciplines. Pour qu'il y est interaction, il faut d'emblée définir deux paramètres de natures différentes et, ensuite les lier. Tout ce situe dans cette liaison artificielle. Avec la numérisation des phénomènes de la perception, il est maintenant commun d'assembler image et son dynamiquement. Cette liaison représente, avec l'émergence du cinéma, la plus utilisée ; avec l'art interactif, il est possible d'imaginer des processus nouveaux de liaisons dynamiques. Cependant, il faut en distinguer la part créative ou au mieux sincère.

>>>>http://www.artsens.org/ingeni.html et http://www.artsens.org/interactivite.html : association art sensitif

4.1. mixed-média/intermédia?
" Autour de 1918, la fraternité entre les arts est due non pas tant à la volonté d’atteindre à une synchronisation et à une monumentalité qui puisse tout embrasser, qu’à la rébellion contre cette réification qui se faisait également sentir dans la subdivision ramifiée des zones de l’esprit objectif."(Adorno). C'est le désir de retrouver, en deçà des particularismes des différents phénomènes de perception, une origine unique.
Il n'est donc pas question d'un art total. D’autres notions feront, en revanche, leur apparition, comme celles de jeu (avec la flexibilité qui lui est inhérente), de processus en voie de formation, qui viendra parfois se substituer à la vision de l’œuvre en tant qu’objet immuable, ou encore de dispositif aux contours indéfiniment remodelables en fonction des circonstances et des technologies.
Dans l'oeuvre d'interaction, il est question de fusion des arts. Pour Kandinsky, la fusion entre le visuel et le sonore, plus que tout système clos de correspondances, est la quête de la « vibration juste » ; Charles Blanc-Gatti utilise le terme « chromophonie » pour désigner une méthode visant l’union des vibrations sonores et lumineuses selon un principe de concordance mathématique. Celle-ci est basée sur les relations entre les couleurs et les harmoniques des sons : (…). Les moyens d’expression artistiques ne doivent pas s’additionner de manière mécanique leurs effets, tendance au parallélisme. En effet, dès qu’un art en imite un autre il s’en éloigne, dans la mesure où il se désavoue la contrainte de son matériau propre. L'adjuvant visuel peut devenir le spectacle dont la musique n'est plus que le soutien.
C'est pourquoi, on distingue les manifestations mixed-média, et inter-média. Les premières désignent des spectacles comme les « light Shows » dans les concerts de rock, où les domaines visuel et sonore demeurent le plus souvent plaqués l’un sur l’autre. Les manifestations « inter-média », terme soumit par Dick Higgins en 1973, désignent des pratiques où s’opère une véritable fusion entre plusieurs champ d’activité, qui poursuivent l’idéal de l’interdépendance rigoureuse des diverses composantes. La distinction de ces deux termes n'est en aucune manière une leçon de bonne conduite en art, seulement un essai de précision qui peut servir lors de la créations d'oeuvres interactives.

>>>>"Musique et Art Plastiques, Interactions au XXè siècle", Jean Yves Bosseur, éd. Minerve, 1998.
>>>>"Interfaces homme-machine et création musicale", sous la direction de Hugues Vinet et François Delalande, Hermès Science Publication, 1999.

4.2. mapping : lien musical
La première oeuvre interactive revient à Nicolas Schöffer en 1956, avec CYSP 1(>>>>voir), première sculpture autonome dotée de capteurs au monde, réagissant à la lumière et au son par des déplacements et par des mouvements de formes colorées.
Une oeuvre interactive tisse des liens entre des entrées et des sorties, ce qu'il y a au milieu est le processus créatif, c'est ce que l'on appelle le mapping. Ce qui circule à travers ces liens dépend de chaque oeuvre, en général, ce sont de l'électricité et des données numériques. Les entrées sont, dans la plupart des cas, des capteurs, sensibles à différents phénomènes : température, lumière, pression, flexion, accélération. En inventant d'autres formes de captures, on peut s'échapper des capteurs standards, qui servent pour les alarmes de sécurité, les déclencheurs, les portes automatiques, ...
Quels capteurs utiliser, quels paramètres musicaux? Si les choix du mapping ne sont pas faits avec une grande application, l a composition musicale et la chorégraphie peuvent facilement finir par être esclave du système. Bien souvent d'ailleurs, lorsque la motivation première de développement d'un instrument réside dans l'utilisation d'une nouvelle technologie de captage, le résultat sonore et musical s'avère décevant. En effet, la mise au point de la nouvelle technologie requiert alors l'essentiel de l'attention disponible au détriment d'autres éléments importants de l'instrument, comme le lien instrumental. L'exploitation d'un nouveau type de contrôle aboutit souvent à une production sonore par trop démonstrative et qui, en étant trop connotée, manque finalement d'expressivité, surtout lorsqu'on la compare à la diversité de contrôle des instruments acoustiques traditionnels. En effet, la plupart des systèmes de musique/danse interactifs se sont appuyés sur des relations simples entre le mouvement et le son, comme l'absence ou la présence du son, le contrôle du volume, peut-être le pitch control.
Le mapping doit permettre une cohérence entre les entrées et les sorties. Pour les liens musicaux, on peut se rapprocher, ou s'inspirer, des instruments traditionnels. Ce sont des machines acoustiquement élaborées, des structures vibrantes spécifiques construites pour fonctionner dans la gamme audible de façon auditivement et musicalement efficace, si perfectionnées, qu’elles n’évoluent plus. Un avantage de la représentation du lien instrumental sous forme de couche logicielle réside dans la possibilité de l'organiser en deux (voire plusieurs) niveaux indépendants : le premier est alors fonction du choix du dispositif d'entrée (contrôleur) et le second du choix du type d'algorithme de synthèse. On peut donc complexifier à son gré les niveaux de correspondances.
Il faut néanmoins, choisir entre deux directions de représentations :
. destiner l'oeuvre à pouvoir être utilisée par tout utilisateur, donc rendre la cohérence gestuelle la plus claire possible, la plus efficace.
. ou rendre les interactions et les contrôles plus complexes, affiner le processus, donc demander à un utilisateur/performer un temps d'apprentissage conséquent, qui se rapproche du travail de l'instrumentiste.

>>>>http://www.artsens.org/seminaire/histo.html : association d'art sensitif : histoire de l'interaction
>>>>"Interfaces homme-machine et création musicale", sous la direction de Hugues Vinet et François Delalande, Hermès Science Publication, 1999.

4.3. Temps réel et composition
Les systèmes informatiques contemporains, pour peu qu'il soit assez puissant, peuvent exécuter des tâches presque instantanément. Le "presque" correspond à la partie physique de l'ordinateur, à sa capacité, aux niveaux de ses composants et de son système d'exploitation, à faire circuler rapidement l'information. S.J Young : "Le terme temps réel sert à décrire toute activité de traitement de l'information ou tout système ayant à répondre à des stimuli d'entrées générées extérieurement dans un retard fini et spécifiable."
Au niveau de l'informatique musicale, le temps réel permet la restitution d'un traitement en même temps que le contrôle de ses paramètres. Cela brouille les frontières entre composition temps réel et le jeu instrumental. Si le temps réel permet les mêmes opérations que le temps différé, pourquoi s’en priver et ne pas profiter de ses a vantages possibles ?
A la notion de temps réel, on oppose la notion de temps différé, qui correspondrait à une forme indirecte, supposant une activité mentale, méditative. Composer c’est en un sens s’affranchir des contraintes du temps réel, concevoir soigneusement un parcours dans le temps- en prenant son temps.
Le compositeur Gilles Racot :"Pour ce qui est de l'attente de l'exécution du calcul en temps différé, ma réaction fut inverse à celles qui condamnaient la lenteur du temps de calcul. En effet, après un lancement du test de réglage du programme, les périodes d'exécution permettaient, dans un silence inaccoutumé dans un studio analogique en activité, une réflexion quasi jubilante sur l'analyse du résultat précédemment obtenu dans la perspective d'extrapoler les réglages aux programmes suivants. Les processus de traitement demandant de très longs temps de calcul (parfois quelques heures) étaient lancés en fin de soirée et effectués durant la nuit selon un programme de lancements échelonnés, ce qui donnait au sommeil du compositeur un profond et délicieux sentiment d'ubiquité laborieuse".

>>>>"Interfaces homme-machine et création musicale", sous la direction de Hugues Vinet et François Delalande, Hermès Science Publication, 1999.

4.4. scène/expositions
Les formes de représentations musicales les plus communes sont l'opéra, le théâtre ou le concert. La scène offre effectivement une dimension physique, concrète qui ne laisse pas indifférent. Pourtant la standardisation de l'architecture théâtrale a figé le rapport scène/salle dans un rapport frontal et fixe. Remplacer l'architecture scénographique, ou l'intégrer sur écrans, avec des images animées, ne constitue pas en soi une ouverture d'une nouvelle dimension communicative et expressive pour la scène, mais elle risque même de l'aplatir sur des modèles de réception cinématographiques ou , pire, télévisuels. Pour Kiesler, le théâtre est avant tout un laboratoire d'essais où on peut expérimenter des visions globales du monde.
La diffusion des technologies nous pousse vers une immersion totale. Le corps en tant que sujet de la perception, et première interface entre nous et le monde redevient central: aux canaux visuel et sonore s'ajoute le canal gestuel qui ouvre à l'échange kinesthésique. Sur scène pour que cela fonctionne, il faut que les acteurs soient des narrateurs capables de regarder les spectateurs dans les yeux, faire sentir que le spectateur est nécessaire à la représentation.
Or, tout comme dans certaines expositions d'art contemporain, on assiste à un art décevant, qui ne montre rien. C'est l'apologie du vide, peut-être pour répondre à l'abondance des images, etc... Le spectateur, l'auditeur, le receveur, est envahit de frustration, car il ne jouit pas de l'instant. Certains trouvent que les live inexpressif, à coup de clic de souris ne sont pas dérangeants, ne posent pas de problèmes. Ils s'opposent ainsi volontairement aux gestes amples et marqués par l'exagération théâtrale. Cependant, je pense que la souris est trop simple et trop une dimension pour un contrôleur de performance musicale et d'improvisation. Les systèmes interactifs musicaux permettent de retrouver un lien inédit entre les gestes et la production sonore.

>>>>"Digital Performance", sous la direction d'Emmanuel Quinz, press ATI srl, 2002.
>>>>"Musique et Art Plastiques, Interactions au XXè siècle", Jean Yves Bosseur, éd. Minerve, 1998.
>>>>http://www.pure-data.org/community/lists : liste de diffusion pure data.
>>>>http://www.apo33.org/article.php3?id_article=76 : association d'art sonore APO33, article sur la musique électronique

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